Ladakh, terre sacrée de l’Himalaya

Le Ladakh, est une région de culture tibétaine située au nord-ouest de l’Inde dans l’état du Jammu et Cachemire, qui compte un peu plus de 290 000 habitants pour 59 146 km2. Cette région, depuis toujours aux carrefours des routes commerciales entre l’Inde, le Taklamakan et le Tibet, a été fermée au tourisme peu après l’indépendance de l’Inde en 1947. Depuis sa réouverture en 1974 elle est devenue une zone touristique de plus en plus appréciée.

Le Ladakh se situe principalement le long de l’Indus, au nord de la chaine de l’Himalaya et au sud du Karakoram. La région subit un climat très continental avec peu de précipitations créant un paysage désertique agrémenté d’oasis. La région est divisée en deux districts administratifs, celui de Leh la capitale, et celui de Kargil à l’ouest. Nous pouvons décomposer la région en sept aires :

  • la région des lacs à l’est (Rupshu, Tsomoriri, Tsokar, Pangong);
  • la vallée de la Nubra au nord;
  • la vallée du haut Indus (Thakthok, Karu, Hemis… vallée de la Markha, Leh jusqu’à Taru, les villages le long du Zangskar jusqu’à Chiling);
  • le bas Ladakh appelé Sham (de NyimuKhalatse, incluant PatharSahabGurudwala, Umla, Alchi, Sumda, Mangyul, Lamayuru, jusqu’au Senge-la);
  • lePurig à l’ouest (du Fotu-la à Kargil en incluant la région de Dah-Hanu);
  • la vallée de la Suru au sud de Kargil (de Kargil au Pentse-la);
  • leZangskar au sud (du Senge-la au Pentse-la, Umasi-la et Shingo-la).

Le Ladakh est une région aux cultures multiples où cohabitent aujourd'hui les populations majoritaires bouddhistes et les minorités musulmanes. La tibétanisation progressive du Ladakh débute au Xe siècle avec l'arrivée du premier roi de la dynastie tibétaine du Ladakh qui s'installe à Shey. Avant cela, la région était constituée de petits royaumes Môns, Dardes, et probablement Turcs. Il y a encore des ruines de ces premiers châteaux, des pétroglyphes qui marquent la présence des premières populations, et les villages de Dha et Hanu qui restent aujourd'hui encore occupés par des populations Dardes.

La première dynastie du Ladakh se centre autour de Shey, les ruines du premier château encore visibles aujourd’hui, en témoignent. Cette dynastie, appelée Lhachen, dura jusqu’à la fin du XVème siècle. A vrai dire, l’histoire de cette période reste encore floue, le Ladakh était morcelé en petits royaumes indépendants et les textes sur cette époque sont très rares. C’est durant le XIème et XIIème siècle que le bouddhisme tibétain s’est vraiment implanté au Ladakh sous l’influence et le soutien des rois.

La seconde dynastie, celle dite des Namgyals, prend le pouvoir à la fin du XVème siècle et dure jusqu’en 1842. Durant le XVIème siècle, le grand roi Tashi Namgyal déplace la capitale du Ladakh à Leh et fit construire le palais du Namgyal Tsemo, le pic de victoire. Plus tard, au début du XVIIème siècle, un de ses plus fameux successeurs, Senge Namgyal, fonde le grand palais de Leh. Son règne marque aussi l’apogée de la puissance et du territoire du Ladakh. La fin du XVIIème siècle est marquée par les tensions grandissantes avec ses voisins, le Tibet et l’empire Moghol. Des traités sont signés afin de réglementer le commerce transitant par le Ladakh. Le XVIIIème siècle est une période de décadence où les conflits internes sont grandissants.

Mais la fin de cette dynastie est liée à la guerre contre le Dogras, des combattants venus du Penjab. Le Maharaja Goulab décide d’annexer le Ladakh pour avoir le contrôle total du commerce de la laine Pashmina et envoie des troupes, avec le général Zorawar Singh à leurs têtes, attaquer le Ladakh en 1834. Après plusieurs années de batailles, la destruction de nombreux bâtiments, objets et textes, une tentative de conquête du Tibet, et la mort du général, le Ladakh est officiellement annexé au royaume de Goulab Singh en 1842. En 1947, à l’indépendance de l’Union Indienne, la région est intégrée à l’état du Jammu et Cachemire, et reste un lieu de tensions entre le Pakistan et la Chine.

Le Ladakh est aussi marqué par différents modes de vies. Des agriculteurs sédentaires dans la vallée de l'Indus et de la Nubra ; et des éleveurs à l'Est dans le Changthang autour du lac Tsomoriri. L'agriculture n'est pas très diversifiée avec principalement la production d'orge, d'un peu de blé, et de moutarde. La culture de l'abricot et de la pomme est aussi à noter. L'élevage de chèvres et de moutons a été une source de revenus importante pendant longtemps avec notamment la production de la laine pashmina servant à tisser le Cachemire.

Le bouddhisme tibétain prend place avec les fondations de nombreux monastères de diverses lignées. Les premiers datent du XIème siècle avec le passage supposé d'un grand maître tibétain, Rinchen Zangpo, qui revint du Cachemire avec des artistes qui ont marqué l'art bouddhiste comme à Alchi ou à Nyarma. Les rois du Ladakh sont restés proches de la religion en formant des relations de chapelain à protecteurs avec des maîtres de la lignée drukpakagyü aujourd'hui la lignée principale du Ladakh. La lignée gelugpa, celle du Dalaï Lama, a pris de l'importance suite à la guerre de 1780-84. Au XXème siècle, Stakna Rinpoche et Bakula Rinpoche furent d'une grande importance pour la reconnaissance de la culture particulière du Ladakh au sein de l'Union Indienne. D'autres lignées sont présentes comme les nyingmapas à Thakthok, les sakyapas à Matho, ou les drigungkagyü à Phyang et Lamayuru. Il ne faut pas oublier non plus les nombreux ermitages et grottes comme Götsang au-dessus d'Hemis ou les grottes de Saspol.

La présence de l'islam fut marquée par le passage de marchands venus de l'Ouest, et du Nord. Le Baltistan voisin, islamisé au XVème siècle par Tamerlan, a toujours entretenu des relations importantes avec le Ladakh. Les premières mosquées datent du XVIème durant le règne du roi Jamyang Namgyal ; sa seconde femme, Gyal Khatun, est une musulmane fille du roi de Skardu Ali Mir Sher Khan, elle a fondé trois mosquées Shiite dont une à Leh. En 1666, le grand Moghol Aurangzeb demande la fondation d'une mosquée sunnite à Leh, ce sera la Jama Masjid, reconstruite dans les années 1980. L'islam du Ladakh est influencé par le Shiisme majoritaire autour de Kargil, et par la confrérie nurbakshia présente au Baltistan. Les musulmans ont eu une grande importance auprès des rois bouddhistes du Ladakh ; ils étaient des savants, des traducteurs, des interprètes, mais aussi des orfèvres, des cuisiniers, et des grands marchands.

D'autres religions sont présentes au Ladakh comme le sikhisme avec la Gurudvala Pathar Sahab, lieu saint situé entre Nyimu et Taru. Le christianisme est présent aussi depuis la fin du XIXème siècle et l'arrivée de missionnaires protestants moraves venus d'Allemagne.

Avec l'invasion du Tibet par la Chine Communiste en 1949, puis les destructions de la révolution culturelle, le Ladakh est devenu en quelque sorte un des sanctuaires important pour la préservation de la culture tibétaine. L'indépendance de l'Inde en 1947 s'est aussi accompagnée de guerres avec le Pakistan voisin et avec la Chine en 1962. Les frontières se sont fermées entraînant une mutation indispensable de l'économie du commerce transfrontalier vers le tourisme.